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by • 30 mars 2018 • Mes chroniques littérairesCommentaires fermés sur ESSOR SARLADAIS du 30 mars 2018.1836

ESSOR SARLADAIS du 30 mars 2018.

 

 

Une sorte de Dorian Gray.

Le Tour des Livres.

 

C’est une sorte de « Portrait de Dorian Gray » que nous propose Jean-Philippe Blondel, dans son très beau roman, paru chez Buchet-Chastel « La Mise à nu ». Le narrateur, Louis Claret, professeur d’anglais vieillissant, séparé de sa femme et loin de ses filles, se laisse porter par la vie. Un soir, il se rend au vernissage d’un ancien élève, Alexandre Laudin, devenu un peintre célèbre. Il était un lycéen effacé, rêveur, maltraité par les autres ; exposer dans sa ville natale est une sorte de revanche. L’artiste souhaite ardemment revoir cet enseignant qui l’a marqué, puis il lui demande s’il peut faire de lui une série de portraits, dans un style nouveau. Le génie de l’artiste se plait à dévoiler le parcours de ses modèles, à faire un bilan sans concession de leur existence. Poser pour lui n’est pas sans danger ; c’est une véritable mise à nu. Alexandre éveille chez Louis un désir d’écrire, de créer. N’est-il pas passé à coté de sa vie réelle ? C’est aussi un exercice révélateur pour le peintre : la solitude douloureuse de l’élève est devenue celle de l’artiste. Que transmettre à ses enfants ? Que connait-on des siens ? Toutes les questions qui font mal surgissent. Tout choix de vie n’est-il pas fait d’une série de deuils ? Un roman magnifique qui évoque autant le Dorian Gray d’Oscar Wilde que le film « la belle noiseuse » de Rivette, pour le rapport entre le peintre et son modèle.

Aux Escales, Constantin Alexandrakis nous propose « Deux fois né », un récit véridique et étrange. En 2011, l’auteur apprend que son père, soi-disant mort, n’a tout simplement jamais su qu’il avait un fils. Il part à Athènes sur les traces de son géniteur, un homme fuyant et peu coopératif. La quête va devenir initiatique pour l’auteur, par sa confrontation avec la mythologie antique et la société grecque. « Deux fois né » dévoile un homme aux prises avec les simulacres de l’identité, une épopée de la bâtardise.

C’est aussi le thème de la filiation qu’aborde le roman de Ghislain Loustalot « La première nuit », paru chez Jean-Claude Lattès. Milan, séduisant quadragénaire alcoolique et taiseux, vient d’être quitté par sa compagne. Deuxième échec cuisant après son premier divorce, quand son ex-femme a obtenu la garde de leurs trois enfants. Au bord du gouffre, un dimanche de spleen, il reçoit la visite simultanée de son fils Théo et de son père Emilien, tout deux à la recherche d’un refuge pour la nuit. L’huis-clos prend des allures de poker menteur où chacun règle ses comptes en redoutant d’être mis à nu par l’autre. De ce mensonge va surgir une vérité salvatrice.

C’est un nouveau cycle romanesque qu’entame Douglas Kennedy avec le premier tome de « La symphonie du hasard », chez Belfond. «Toutes les familles sont des sociétés secrètes. Des royaumes d’intrigues et de guerres intestines, gouvernés par leurs propres lois, leurs propres normes, leurs limites et leurs frontières » nous dit-il. Editrice new-yorkaise, Alice Burns s’apprête à rendre visite à son jeune frère en prison. Adam, ancien jeune loup de Wall Street, a connu la chute. Ce jour là, Adam soulage sa conscience et révèle à sa sœur un secret qui met en péril les derniers liens qui unissent encore leur famille. Alice repasse l’histoire de ce clan volontaire, ambitieux, impitoyable et perpétuellement en quête de rachat : une image même de l’Amérique.

 

JEAN-LUC  AUBARBIER.

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