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by • 19 novembre 2021 • Mes chroniques littérairesCommentaires fermés sur Essor Sarladais du 19 novembre 2021.811

Essor Sarladais du 19 novembre 2021.

CHEVREUSE.

Le Tour des Livres.

Avec « Chevreuse », paru chez Gallimard, Patrick Modiano, prix Nobel de littérature, nous propose un roman sur la mémoire, dans la tradition de Marcel Proust. Comme dans «La Recherche », Jean Bosmans y est un homme mûr qui cherche à se souvenir d’évènements, à travers le jeune homme et l’enfant qu’il fût. Qu’évoque pour lui le mot Chevreuse ? Une chanson, un rendez-vous. Le mot ricoche dans sa tête, jouant avec d’autres mots, des images, des lieux. Un appartement à Auteuil, un  numéro de téléphone, une certaine Camille, une Martine. Les différents âges de sa vie se chevauchent dans des lieux identiques, mais les choses changent, elles sont infidèles, une maison peut être accueillante le jour et hostile la nuit. Des individus louches apparaissent, Jean Bosmans a été témoin de quelque chose qu’ils veulent découvrir. Lui veut seulement se rappeler de quoi. Le livre, l’écriture, fixent le souvenir et le volent en même temps. Les philosophes grecs et les penseurs occultistes avaient développé l’art de la mémoire, Patrick Modiano le perfectionne.

On apprenait autrefois à l’école primaire l’histoire des bourgeois de Calais qui se présentèrent, la corde au cou, devant le roi d’Angleterre, en s’offrant en sacrifice pour qu’il épargne leur ville. Michel Bernard nous raconte, dans un roman éblouissant : « Les Bourgeois de Calais » publié à la Table Ronde, la naissance de l’œuvre du sculpteur Auguste Rodin qui illustre cet épisode de la guerre de Cent Ans. En 1884, il est encore inconnu et pauvre. C’est un autre bourgeois calaisien, le maire de la ville Omer Dewavrin, qui lui commande cette œuvre qui va révolutionner son art. Les deux hommes sont du même âge et vont nouer une solide amitié. Il existe aujourd’hui douze exemplaire des Bourgeois de Calais, répartis dans le monde.

Périgourdin de cœur, Bernard Bonnelle publie, chez le même éditeur, « Les Noces de Gênes », un récit beau et douloureux, pudique et dépouillé, qui évoque le décès de son épouse. Son écriture élégante est surtout un hymne à la vie et à l’amour. Le livre débute par un accident, à Saint-Avit, où deux époux âgés trouvent ensemble la mort. Dans un autre ouvrage paru cette année chez Arthaud : « Toucher le ciel », il raconte l’amitié entre Saint-Exupéry et Henry de Ségogne, l’homme qui créa le festival des jeux du théâtre de Sarlat.

Chez Gallimard, Boualem Sansal publie une « Lettre d’amitié, de respect et de mise en garde aux peuples et aux nations de la terre ». Il a posé en exergue la phrase de La Boétie, tirée de son « Discours de la Servitude Volontaire » : Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux. Ce court texte est un résumé de sa pensée : les douloureuses relations franco-algériennes, le fanatisme et nos mauvais comportements,  les dangers qui menacent le monde, avec quatre démons : l’argent, la religion, les fast food et les jeux d’arènes. Il nous propose un projet de constitution universelle qui est un hymne à la liberté.

                                                                  Jean-Luc  Aubarbier.

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