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by • 6 mars 2015 • Mes chroniques littérairesCommentaires fermés sur ESSOR SARLADAIS du 7 mars 20152559

ESSOR SARLADAIS du 7 mars 2015

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LA TENTATION DU PIRE.

Le Tour des Livres.

 

C’est un morne avenir que nous promet Michel Houellebecq dans un roman aussi déprimant que remarquable : « Soumission », paru chez Flammarion. Roman aux accents prophétiques, puisqu’il est sorti le jour même de l’attentat contre Charlie Hebdo. Le second tour des élections présidentielles de 2022 oppose le Front National et un candidat islamiste « modéré » que choisissent de soutenir les partis classiques. François, le héros, prof de littérature, s’ennuie autant dans son métier que dans sa vie sexuelle erratique. Sa seule passion est pour l’écrivain Huysmans, qui est sorti de sa vie misérable grâce à sa conversion au catholicisme. François s’embarque, à travers une France pourrie de violence, dans un pèlerinage à Rocamadour où une « hypoglycémie mystique » lui offre une révélation vide de sens. Peu à peu, la France s’organise sous la houlette de la Fraternité Musulmane (lire les Frères Musulmans). La délinquance est réduite, les aides affluent des royaumes pétroliers, le chômage baisse fortement (les femmes sont priées de rester à la maison), les juifs sont poursuivis (ce qui ne dérange pas trop François, qui vit dans le paisible quartier chinois). Sa solitude lui pèse. Pour enseigner à l’université, il doit obligatoirement se convertir à l’islam….aprés tout, pourquoi pas ! François découvre même les avantages de la polygamie. On sait depuis longtemps que le « héros » houellebecquien n’a rien d’un Jean Moulin. Ne serait-il pas un humain ordinaire, prés à tout pour se protéger et satisfaire ses envies ?

Notre voisin corrézien Louis-Olivier Vitté nous propose son dernier roman  « Le secret de Tire-Lune », paru chez Calmann-Lévy. Sur les bords de la Dordogne limousine, dans l’entre-deux guerres, les habitants d’un petit village sont intrigués par ce vagabond, surnommé Tire-Lune, qui apparait et disparait mystérieusement. Il ne sort que la nuit, comme un vampire, mais semble inoffensif. Un jeune garçon parvient à apprivoiser le ‘sauvage’ qui lui révèle un terrible secret.

Autre corrézienne, Sylvie Anne choisit la même époque, 1935, et un lieu voisin, entre Limoges et Solignac, pour situer son roman « La Vie d’Agnès », paru aux Presses de la Cité. Brutalement projetée, à vingt ans, à la tête de « La Vie du Limousin », un journal local, Agnès découvre que les caisses sont vides, et que les patrons de la presse parisienne veulent s’emparer de sa modeste publication. Cette toute jeune femme va devoir apprendre très vite à évoluer dans un univers masculin, et à contrer sa redoutable belle-mère, Irène, qui n’en est pas à un coup bas près.

Chez Albin-Michel, Eric Pessan nous propose « Le démon avance toujours en ligne droite ». Journaliste radio à Bordeaux, David demande un congé pour partir à la recherche de son père et de son grand-père, disparus l’un après l’autre, à trente ans d’intervalle. Il sait seulement que Lisbonne était leur destination, et qu’ils y seraient devenus clochards. Il se rend dans la capitale lusitanienne, croyant retrouver son géniteur dans chaque épave humaine. Un roman hanté par les thèmes de la disparition, de la malédiction proférée par les femmes et par l’enfance prisonnière de leurs ressentiments et de leurs mensonges.

Chez Belfond, Saïdeh Pakravan, romancière française d’origine iranienne, nous offre une plongée dans la république des mollahs, avec « Azadi ». Azadi signifie ‘liberté’ et c’est le nom de la place de Téhéran où se regroupent les étudiants, las de la dictature et des élections truquées, en 2009. Etudiante en architecture, la jeune Raha voit sa vie basculer en un jour. Arrêtée, torturée, elle perdra à jamais ses illusions et son innocence. Un roman non-manichéen, qui révèle toute la complexité et la beauté de la pensée iranienne.

Les amateurs d’aviation découvriront avec délice l’ouvrage de Dorine Bourneton, « Au-dessus des nuages », paru chez Robert Laffont. Paralysée à la suite du crash de son Piper, elle parvient à reprendre les commandes malgré son handicap, et se livre au plaisir de la voltige. Aussi généreuse que volontaire, elle nous donne une formidable leçon de vie.

 

JEAN-LUC  AUBARBIER.

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