Voyages dans l’espace et le temps.
Le Tour des Livres.
La romancière dommoise Béatrice Commengé est un de nos grands écrivains voyageurs. Elle publie chez Verdier (l’éditeur prestigieux de Pierre Michon et Pierre Bergounioux) « Ne jamais arriver » où elle nous entraine sur les pas d’Ovide, le poète romain exilé à Tomis, un port sur la mer Noire (dans l’actuelle Roumanie). Immobilisée par le Covid, elle commence son voyage sur les cartes et sur internet. Le poète du plaisir et de l’amour, auteur de « L’art d’aimer », s’y lamenta longuement sur sa solitude : « ici, le barbare, c’est moi », écrivait-il avec lucidité. Condamné à l’exil par l’empereur Auguste, à l’époque où Jésus est encore un adolescent, il traversa l’Italie, la Grèce, l’actuelle Bulgarie avant d’atteindre l’ile minuscule où il devait résider. Béatrice, en voyageant, se rapproche des bruits du monde : la guerre a éclaté dans l’Ukraine voisine. Elle fait, comme Ovide, l’expérience de l’attente et de l’insécurité, Il reste peu de traces physiques d’Ovide, mais l’espace libre laisse la place pour que le rêve se poursuive. Les éditions Verdier ont publié en poche le dernier livre de Béatrice Commengé « Voyager vers des noms magnifiques », de Trieste à Sigmaringen, sur les pas d’écrivains célèbres.
Les éditions Mon Limousin ont réédité un des premiers ouvrages de Corinne Javelaud, « Alix de Rochechouart » qui se déroule en Limousin, au début du XIII° siècle. S’appuyant sur la légende autant que sur l’histoire, elle raconte la mésaventure de la belle Alix, épouse du vicomte Aymeric. Faussement dénoncée pour son inconduite, elle est condamnée par son mari à être dévorée par le lion féroce, caché dans les oubliettes du château. Heureusement, la vérité finira par éclater et le fauve se révèlera plus généreux que l’humain coléreux. Une ambiance envoûtante de superstitions baigne ce court roman que l’on dévore … comme un lion.
C’est à travers le paysage allemand de la Forêt Noire que nous entraine Hubert Haddad avec « La Symphonie atlantique » publié chez Zulma. Tandis que la société allemande se nazifie, le jeune Clemens , se réfugie dans l’univers harmonieux de la musique. Son violon est sa seule arme contre la violence. A sept ans, il doit quitter les siens et s’enfuir, sous la protection de sa professeure de musique. Forcé d’intégrer les Jeunesses hitlériennes musicales, il se protège de la barbarie grâce à Liszt, Mozart ou Grieg. Mais, venu d’outre-Atlantique, le concert des bombardiers alliés va s’abattre sur lui. Un roman rédigé sous la houlette des romantiques allemands, avec la forêt pour océan.
Périgourdin de cœur et de mémoire, Jean-Paul Soulillou publie « Place de la Victoire » aux éditions du Céou. Avec un style sensible et élégant, il raconte ses jeunes années à Moncalou, et dans plusieurs villages du Périgord où ses parents étaient instituteurs. On y découvre le Périgord des années Cinquante, et une enfance heureuse qui se poursuit par des études à Bordeaux. Un premier récit prometteur.
Jean-Luc Aubarbier.
Salon du Vignon-en-Quercy (Lot) 24 novembre 2024. Article suivant