Un Goncourt en Italie.
Le Tour des Livres.
Le jury Goncourt 2023 a récompensé Jean-Baptiste Andrea (et pour la première fois, les éditions de l’Iconoclaste) pour son beau roman « Veiller sur elle ». Gênes, 1986 : dans une abbaye où il est enfermé depuis 40 ans, un étrange moine est sur le point de rejoindre son Créateur. Au début du siècle, Mimo est un sculpteur surdoué et reconnu. Il présente la particularité d’être frappé de nanisme. Dès son adolescence d’enfant pauvre et infirme, il noue une relation d’amitié amoureuse avec Viola, fille du comte Orsini. La demoiselle a la curieuse habitude de vagabonder en compagnie d’une ourse sauvage et de dormir sur des tombes. Elle est dotée d’une mémoire absolue qui lui donne un savoir encyclopédique. Elle passe pour un peu sorcière. Aux côtés de ce couple étrange, nous suivons les évènements de l’Italie des années 20 et 30, dans les milieux catholiques et fascistes. Mimo va sculpter une Piéta à la beauté indépassable, qui cache un secret qui la rend impossible à montrer en public. Il y a quelques choses des « Puissances des Ténèbres » d’Anthony Burgess dans ce très bon Goncourt au style clair, qui teinte d’humour un réalisme fantasmé.
C’est à la Renaissance italienne, à Ferrare, que Maggie O’Farrell situe « Le Portrait de mariage » édité chez Belfond. A 15 ans, Lucrèce de Médicis épouse le duc Alfonso de Ferrare. Un an après, elle est morte, probablement assassinée par son époux. C’est à partir de ce fait historique, dont il ne reste qu’un portrait, que la romancière irlandaise brode l’histoire d’une adolescente sauvage et sensible, que rien ne prévoyait à jouer ce rôle de duchesse qu’elle refuse. Une enfant prise dans des intrigues de cour, une jeune femme réduite au rôle de ventre devant donner absolument un héritier à la couronne. Face à elle, un homme aussi charismatique que terrifiant. Une œuvre au style extrêmement détaillé.
C’est dans l’Italie du premier siècle avant notre ère, au sein d’une autre famille puissante, que Sophie Malick-Prunier a trouvé le personnage de Clodia pour son roman historique « Clodia ou le scandale de la Bonne Déesse » édité chez Robert Laffont. Héritière sulfureuse des Claudii, patriciens romains, Clodia parvient à déjouer les contraintes de son sexe pour acquérir pouvoir et liberté. Son frère s’est déconsidéré en assistant, déguisé en adolescente, au culte de la Bonne Déesse, réservé aux femmes. Un épouvantable scandale en a rejailli. Tandis que la République agonise, elle devient l’agent du succès de César et inspire une brûlante passion au poète Catulle.
Au Cherche-Midi, l’Américain Jonathan Santlofer nous propose « L’Héritage de Mona Lisa ». Descendant de l’homme qui a volé la Joconde en 1911, retrouvée à Florence deux ans plus tard, Luke Perrone découvre, à la bibliothèque de la basilique San Lorenzo à Florence, le journal de son grand-père. Il révèle qui a commandité le vol et pourquoi. Une enquête qui nous mène du milieu des collectionneurs à celui des moines franciscains et élabore une (nouvelle) théorie sur l’œuvre de Léonard de Vinci.
Jean-Luc Aubarbier.
Essor Sarladais du 5 janvier 2024. Article suivant
Salon du livre de Confolens, le 3 février 2024.