Chronique « Le Tour des Livres » du 28 février 2014 : Triangle rose.
TRIANGLE ROSE.
Le Tour des Livres.
Avec « Le silence des rails », son quatrième roman, publié chez Flammarion, Franck Balandier aborde le douloureux sujet de la déportation des homosexuels par les Nazis. Alsace 1942, Etienne a beau être marié à Georgette, il n’entretient pas moins de fréquents rapports avec le milieu homosexuel. Dénoncé, arrêté, il est interné au camp du Struthof, porteur du triangle rose. Maltraité par les gardes (250 hommes et 7 femmes qui ne sont pas moins féroces que leurs collègues masculins), méprisé par les Triangles rouges (politique), il plonge dans un hiver long de plusieurs années. Il ne doit sa survie qu’à la sympathie de deux gardiens (qui risquent leur vie s’ils se rapprochent des détenus). Employé pour vider les cendres du crématoire (et donc condamné à mort pour ce qu’il voit, ce qu’il sait), des cendres qu’il répand dans le jardin de Kramer, le chef de camp, il attend chaque jour une mort qui ne vient pas. C’est aussi un roman sur le Struthof, le seul camp d’extermination situé en territoire français (là où est mort Henri Bonnel, libraire et résistant sarladais), un roman au phrases brèves, saccadées, comme essoufflées.
C’est à la même époque, celle d’un Nazisme finissant, que Pierre Assouline situe son roman « Sigmaringen », publié chez Gallimard. De septembre 1944 à avril 1945, la petite ville allemande de Sigmaringen a abrité le gouvernement du maréchal Pétain, fuyant devant les Alliés. Dans le château des princes de Hohenzollern, Julius Stein, le majordome (et narrateur de l’histoire), veille au bon ordre de ce royaume d’opérette où chacun jalouse son voisin, pour une meilleur chambre ou une nourriture plus abondante, où certains se croient encore ministres alors qu’ils ne gouvernent plus rien. L’ennui pèse sur cet univers de petits complots minables, de médisances. Les bombardiers qui saccagent l’Allemagne épargnent cet ilot de médiocrité qui plie sous les propos grinçants de Céline. Dans l’huis-clos étouffant du château, dont la bibliothèque devient le point central, plane une ambiance de fin de règne, de fin du monde. On attend Godot …. Il ne va pas tarder à arriver.
Chez Calmann-Lévy, Gérard Mordillat nous propose « Xenia », l’histoire de deux héroïnes ordinaires des temps modernes. Lorsque Xenia se retrouve seule avec son bébé, abandonnée par son compagnon qui a dérobé ses maigres économies, elle peut compter sur la solidarité de Blandine. Les deux femmes travaillent désormais comme caissières dans un supermarché, vivent ensemble, se serrent les coudes. Mais Blandine est menacée de licenciement pour avoir récupéré des fruits dans la poubelle du magasin. Une profonde humanité se dégage de ce texte tout en sensibilité. Se battre pour sauvegarder son emploi, sa dignité, éviter la misère tout en préservant les valeurs essentielles.
Chez XO, Mireille Calmel nous propose le deuxième tome de son cycle romanesque consacré à Richard Cœur de Lion et intitulé « Les chevaliers du Graal ». Le féérique et l’historique s’y mêlent avec beaucoup de talent et nous invitent à découvrir l’épopée des croisades sous un autre jour. En massacrant ses prisonniers, Richard rend tout dialogue avec Saladin impossible. Mais un nouveau danger, plus sournois, menace les Chrétiens. Le chef de la secte des Assassins, qui détient les pouvoirs du Graal noir, peut faire basculer le sort en faveur du camp musulman. La jeune Eloïn, aidée par sa mère Loanna de Grimwald, va ramener la lumière au cœur de l’ombre et rétablir le prestige du roi.
Avec « Renaissance », toujours aux éditions Les Précieuses Ecritures, le Sarladais Nicolas Bouvier nous propose le troisième tome des aventures de son héros Jérôme Marchand. Le jeune homme est à présent étudiant en droit et le harcèlement scolaire dont il a été victime n’est plus son souci premier. Il aspire à devenir écrivain et connait un premier succès quand il apprend qu’Antoine Verger, celui qui a provoqué la mort de sa sœur et a laissé Jérôme défiguré, vient de s’évader de prison. Il ne veut qu’une chose : se venger de Jérôme qui l’a fait condamner.
JEAN-LUC AUBARBIER.
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