Quelque chose en nous de Sadorski.
Le Tour des Livres.
Je dois à Romain Slocombe d’avoir compris le sens réel du mot « empathie ». Ce que l’on ressent pour le répugnant héros des six volumes des aventures de l’inspecteur Sadorski, dont le dernier tome « J’étais le collabo Sadorski » parait chez Robert Laffont, n’est ni de la sympathie, ni de la compassion. Certes, il traverse une époque difficile : la guerre, l’Occupation, en exerçant le dur métier de policier. Mais l’homme est abominable : cruel, malhonnête, abuseur de femmes, antisémite. Bref, un héros que l’on adore détester. Mais il résonne en lui une noire fraternité : qu’aurions-nous fait à sa place ? Nous aurions été moins violent, mais peut-être par lâcheté. Et puis, il aime tellement la vie ! Il est près à tout pour la conserver (et nous ?). A sa manière, celle d’un animal, d’un fauve, il aime Yvette, son épouse, et Julie, la petite juive qu’il a cachée chez lui (pour en abuser). Dans le dernier opus « J’étais le collabo Sadorski », il tombe aux mains de résistants communistes, après la Libération de Paris, qui lui font passer un sale quart d’heure. Enfermé dans le redoutable Institut Dentaire du square de Choisy, il y découvre les tortures (semblables à celles administrées par les nazis) et les exécutions sommaires de vrais coupables, d’un peu blâmables et même d’innocents. Sans parler des règlements de compte à l’intérieur du Parti Communiste. L’ambiance folle de l’épuration ! Mais Sadorski est un opportuniste, de ceux qui s’en sortent toujours. Avec un cycle romanesque où tout est vrai, Romain Slocombe réinvente le meilleur du roman noir.
Le Danois Jussi Adler Olsen est une référence incontournable du thriller mondial. Avec « Sel », paru chez Albin Michel, on découvre son héros, Carl Mork, chez du bureau V, chargé des cold cases, en proie à une série de meurtres mystérieux, déguisés en accident. A chaque fois, on retrouve une poignée de sel près de la victime. Le suicide de Maja, 32 ans après qu’une explosion ait tué son bébé, relance l’affaire. Mork découvre que le tueur n’agit que les années paires, et toujours à des dates correspondant à l’anniversaire d’un dictateur du XX° siècle. Quel calcul ésotérique préside donc à ses attentats ? Un jeu sur le huis-clos urbain et les règles incertaines du temps.
C’est en Périgord, au printemps 1910, que Philippe Grandcoing situe son roman « La malédiction de Rocalbes », paru chez de Borée. Pour cette cinquième aventure, son héros, l’antiquaire Hippolyte Salvignac, décide d’acheter le château de Rocalbes, près des Eyzies. La région est en révolution : on y découvre des silex taillés, des squelettes anciens et des grottes ornées à foison. Il croise même la route du préhistorien suisse, un rien escroc, Otto Hauser. Mais les meurtres s’accumulent, des fantômes semblent surgir de leur tombeau pour réclamer vengeance. Les lourds secrets abrités par le manoir de Rocalbes ont un besoin urgent d’être mis au jour.
Un fou mène l’enquête ! Tel est le pitch de l’excellent polar, « A Vif », que René Manzor signe chez Calmann-Lévy. Dans le village de Gévaugnac, près de Toulouse, on découvre le corps d’une jeune fille brûlé sur un bûcher. Persuadée du retour de celui que l’on surnomme L’Immoleur, la capitaine Julie Fraysse demande l’aide de Novak Marrec, le précédent enquêteur. Or, depuis son échec, Novak est interné en hôpital psychiatrique.
Jean-Luc Aubarbier.
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