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by • 4 décembre 2020 • Mes chroniques littérairesCommentaires fermés sur Essor Sarladais du 4 décembre 2020.1170

Essor Sarladais du 4 décembre 2020.

Univers parallèles.

Le Tour des Livres.

   Favori pour le prix Goncourt 2020, avec son roman « L’anomalie », paru chez Gallimard, Hervé Le Tellier nous propose une œuvre étrange et dérangeante. Il faut rappeler qu’il est membre de l’Oulipo, spécialiste de l’écriture expérimentale sous contrainte.  Le livre nous propose une série de personnages très différents : Blake le tueur à gages international, Victor Miesel, l’écrivain à la modeste renommée, Joanna, la brillante avocate, Slimboy, le chanteur nigérian qui dissimule son homosexualité,  et plusieurs autres. Tous ont en commun d’avoir pris un avion d’Air France à destination de New York. L’appareil a été pris dans une tourmente, a rencontré un étrange nuage, et puis… a atterri sur un aérodrome militaire. Mais il y a des anomalies dans les dates, des faits impossibles. En fait, un même appareil, contenant les mêmes passagers, a atterri à deux dates différentes, en mars et en juin, à quatre mois d’intervalle. Il se trouve donc sur la planète, des gens en double, ayant vécus les mêmes choses, ou presque. Car certains sont morts entre ces deux dates, des couples se sont séparés ou formés. Ses doubles sont-ils de véritables êtres humains ? Nos dirigeants sont-ils prêts à laisser une telle anomalie se propager ?

Excellent premier roman que nous propose Hugo Lindenberg, avec « Un jour ce sera vide », paru chez Christian Bourgois. Un été, une plage normande. Le narrateur, encore enfant, rencontre Baptiste, un garçon de son âge, et se lie d’amitié. Tout l’éblouie dans la famille de Baptiste : sa mère, qu’il trouve belle et élégante, son père, sûr de lui. Ils sont riches, modernes, éclairés, équilibrés. Baptiste est un enfant solaire. Lui est un gamin solitaire, névrosé, complexé. Il a honte d’être orphelin, honte de sa grand-mère, trop grosse, avec trop d’accent, de sa tante, à moitié folle. Avec cet orgueil caractéristique des timides, il a peur des moqueries et de ce que l’avenir lui réserve. Aime-t-il véritablement son ami Baptiste, ou bien ne fait-il qu’envier un bonheur qu’il juge inaccessible ? Un roman écrit avec la sensibilité d’un peintre des sentiments.

La veille de Noël de l’an 1800, rue Saint-Nicaise, à Paris, une machine infernale explose, causant de nombreuses victimes, sauf celui qui était visé : Napoléon. C’est ce passage exceptionnel de l’Histoire, au moment où le sang de la Révolution n’est pas encore sec, mais où un régime impérial s’installe, qu’a saisi Gwenaële Robert, dans son roman « Never Mind », paru chez Robert Laffont. Le futur empereur en profite pour éliminer ses opposants : Fouché en fait déporter une centaine. Mais les véritables coupables, traqués par le ministre de la police, demeurent introuvables. Parmi eux, Joseph de Limoëlan, rongé de remords. Les anonymes de l’Histoire ne mesurent pas toujours la portée de leurs actes. Professeure de Lettres à Saint-Malo, l’auteure nous propose un roman au souffle puissant, qui fouille l’Histoire et le cœur surprenant des hommes.

Chez Buchet-Chastel, Hector Mathis nous propose « Carnaval », où l’on retrouve les personnages de « K.O. », son premier roman. Atteint d’un mal incurable, Sitam quitte les siens et disparait. La solitude pesant trop sur sa misérable existence, il tente, en vain, de retrouver sa compagne, puis regagne la banlieue où il a passé son enfance. Ils y retrouvent ses copains, et rien n’a changé : petite délinquance, manque d’argent, soif d’aventures. Parvient-on jamais à quitter ce milieu dur et festif ? Un roman au style musical, dansant et polyrythmique.

                                                                                    Jean-Luc  Aubarbier.

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