Amour en camp.
Le Tour des Livres.
« Six ans et deux cents jours » est un premier roman très réussi que Josette Chicheportiche publie chez Jean-Claude Lattès. En 1946, Madeleine, une jeune Eurasienne, et Michel, un soldat de l’armée française, tombent amoureux dans des circonstances tragiques. Le Viet Minh vient de les faire prisonniers, en s’emparant de la petite ville de Vinh, dans le nord de l’Annam. Une longue marche va conduire les habitants de Vinh et les soldats, jusqu’à un camp de prisonnier où ils doivent être ‘rééduqués’. Leur amour nait dans ces conditions misérables, de la faim, de la fatigue et de l’humiliation. Heureusement, le chef du camp va se révéler humain et compassionnel. Trop humain, puisqu’il est remplacé par un bourreau qui fait croire à Madeleine que son mari a été tué, pour mieux profiter d’elle. Un texte à la belle écriture qui vaut un reportage sur la vie quotidienne des captifs du Viet Minh.
C’est également d’un style somptueux, puissant et poétique que Patrick Fort nous raconte la geste de Giovanni Fontana, ancien membre des Brigades Internationales, dans « Le foulard rouge » publié chez Gallimard. Réfugié en France, il a été emprisonné au camp de Gurs, en Béarn, tout d’abord par la république, puis par le régime de Vichy. Comment survivre à l’ennui, au manque de nourriture et de médicaments ? Grâce à l’amour de Maylis, il parvient à s’enfuir et rejoint la Résistance. Mais Maylis est arrêtée sur une dénonciation mystérieuse, et déportée. A la fin de la guerre, il la croit morte ; elle le croit disparue et, sans amour, épouse Victor. En 1996, l’affaire se dénoue enfin. Giovanni a 79 ans, mais il revient à Gurs pour retrouver celle qu’il n’a jamais oubliée et faire éclater la vérité.
Chez Belfond, Christian Blanchard nous propose « Angkar », un roman terrifiant sur les heures sombres de notre histoire. Champey essaie de se reconstruire après une très douloureuse séparation, avec sa fille de six ans Mau, à qui elle invente un père mort. Des cauchemars violents, des images de bombardements et de sang, la ramènent au Cambodge, sous le règne terrible des Khmers rouges. Devant leurs répétitions et leurs précisions, elle décide de retourner dans son pays natal. La mère et sa fille vont devoir se confronter à l’insoutenable et cruelle vérité de leurs origines.
Le Néerlandais Joost de Vries nous livre, aux Escales, un roman picaresque, et étonnant, traversé de références littéraires « Leurs ailes de géants ». Edmund et Sieger sont deux frères, brillants mais très différents. Edmund est plus rêveur ; il aurait voulu naître dans un siècle plus grand, où l’on pouvait encore découvrir des territoires inexplorés. Il voyage grâce à sa fortune, mais sans illusions, jusqu’au jour où sa belle sœur disparait. Il se lance à sa recherche avec l’ardeur d’un Indiana Jones, mais l’aventure n’est pas toujours où l’on croit. Sieger, lui, est reporter de guerre ; l’aventure, il connait, et même un peu trop. Il se trouve être le seul témoin d’un attentat qui a couté la vie à un politicien russe. Tous les services secrets d’Europe se lancent à sa poursuite.
Jean-Luc Aubarbier.
Chronique littéraire du 19 juin 2020 Article suivant
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