Une passante inoubliable.
Le Tour des Livres.
Les lecteurs périgourdins ont découvert Jean-Marc Parisis grâce aux « Inoubliables » où il racontait, avec une infinie émotion, l’histoire des enfants déportés de La Bachellerie. Déjà son roman « Avant, pendant, après » nous avait avertis de l’extrême finesse de style de cet écrivain discret et atypique. Aujourd’hui, il publie, chez Flammarion « L’histoire de Sam ou l’avenir d’une émotion ». Alors qu’il s’apprête à partir en Dordogne, chez ses grands parents, pour les vacances d’été, Sam croise la route de Deirdre, un Galloise de son âge (14 ans) en voyage scolaire. Un amour fou et chaste s’empare des deux adolescents. Pendant quelques heures, ils ne se quittent pas, se promettent une inséparable vie à deux. Mais ils n’ont pas l’âge des décisions, et Sam part pour le Périgord avec tout juste une adresse et un chagrin au cœur. Il lui écrit, elle répond peu, puis plus du tout. La vie passe ; Deirdre n’a été qu’une de ces passantes que chantait Georges Brassens. Mais, comme dans le poème d’Antoine Pol, lorsque la vie se heurte à l’échec, les souvenirs reviennent. Sam retourne à Francy, le village de son enfance, à la recherche de son amour perdu …. qui lui réserve une surprise.
Un autre roman, tout aussi court et publié également chez Flammarion : « Jour de courage » de Brigitte Giraud. Comment avouer devant toute la classe que l’on est gay ? Livio profite d’un exposé sur les autodafés de livres pour parler du médecin juif Magnus Hirschfeld, le premier sexologue de l’histoire, dont les ouvrages ont été brûlés par les Nazis. Livio s’assimile à toutes les minorités opprimées, et d’autant plus facilement que Hirscfeld est également homosexuel. L’adolescent fait appel aux cours d’histoire, de philosophie, de sciences, pour aboutir au résultat souhaité. Sa professeur de lettres, ses camarades, son amie Camille qui est amoureuse de lui ; personne ne comprend où il veut en venir. Mais ils retiendront une phrase de Heine : là où l’on brûle les livres, on finit par brûler les hommes.
Partons pour l’Argentine avec « Tout pour la patrie » de Martin Caparros, édité chez Buchet-Chastel. En 1933, en pleine crise économique, le football est la seule consolation du peuple. Quand Junin, le joueur adulé, disparait, les rumeurs vont bon train. S’est il réfugié dans son village natal pour obtenir un salaire encore plus scandaleux ? A-t-il fuit le pays ? Son ami, le dealer de cocaïne Andrès Rivarola se fait fort de le retrouver. Mais un assassinat dans un hôtel miteux va faire basculer l’histoire. Dans une ville perdue de pauvreté et labourée par les milices fascistes, Rivarola croit pouvoir changer son destin. Un faux polar, mais un véritable roman sociologique sur l’Argentine et son amour immodéré du football.
Chez Calmann-Lévy, la Colombienne Pilar Quintana nous propose « La chienne », un court roman qui a bouleversé son pays. Entre océan déchainé et jungle menaçante, Damaris vit avec son mari pêcheur. Elle souffre de ne pas avoir d’enfant. Un jour, elle adopte un chiot et se prend d’une passion totale pour le petit animal qui vient remplacer le bébé absent. Lorsque la chienne disparait, c’est l’univers tout entier de Damaris qui s’écroule. Un roman féroce et émouvant sur le mal d’enfant.
Jean-Luc Aubarbier.
Essor Sarladais du 22 mai 2020. Article suivant
Essor Sarladais du 5 juin 2020.