Barbara Abel ou l’horreur ordinaire.
Le Tour des Livres.
Je ne sais si, en parlant de la banalité du mal à propos du procès Eichmann, Hannah Arendt a influencé Barbara Abel. Mais cette dernière, en nous faisant découvrir l’horreur ordinaire qui se dissimule chez les êtres les plus communs, est devenue un des auteurs phares dans le domaine du thriller. Dans « L’innocence des bourreaux », des clients d’un supermarché, pris en otages, disjonctaient jusqu’au crime le plus abject. Avec « Je sais pas », toujours chez Belfond, Barbara Abel franchit un nouveau pas. Camille, une jeune femme discrète, et Patrick, son époux autoritaire et psychorigide, sont les parents heureux d’une adorable petite Emma, âgée de cinq ans. Emma est un peu perturbée après avoir découvert sa mère dans les bras de son amant. La fillette capricieuse se venge sur son institutrice, la maladroite Mylène. Au cours d’une sortie scolaire, elle s’éloigne dans la forêt, se perd, tombe dans un trou. Mylène, partie à sa recherche, tombe à son tour et se blesse. Elle parvient toutefois à extirper la fillette du gouffre et lui demande d’aller chercher du secours. Quand on la retrouve, Emma refuse de dire ce qui c’est passé. Qu’est devenue Mylène ? Je sais pas répond-elle obstinément aux policiers et à ses parents. Jusqu’où une enfant de cinq ans peut-elle aller dans sa vengeance ? Pourquoi Mylène et Emma se ressemblent-elles autant psychologiquement ? Qui est Etienne, l’amant secret de Camille ? Un suspense insoutenable.
La Briviste Régine Laprade publie aux Monédières « Pour une symphonie » un délicieux roman dont elle a le secret. Médecin militaire à la fin des années 30, Franck Müller de Richtenbourg part en Allemagne, en 1943, sur ordre de sa hiérarchie, pour soigner les prisonniers français. Il découvre à Berlin la misère des camps et de la guerre, et aussi, une étrange jeune fille : Ingrid Müller von Richtenbourg. Une réflexion sur la fragilité des frontières qui séparent les humains.
Michel Bernard nous entraine à la fin du XIXe siècle avec « Deux remords de Claude Monet » publié à la Table Ronde. Juste avant de mourir, le peintre le plus célèbre de cette glorieuse génération demande que son tableau « Femmes au jardin » soit exposé à l’Orangerie. Sur cette toile figure deux personnes qui lui tiennent particulièrement à cœur. Son ami peintre Frédéric Bazille a été tué dans les derniers jours de la guerre contre la Prusse. Degas, Manet, Renoir, eux-aussi s’étaient engagés, tandis que Monet se réfugiait à Londres avec sa famille. Et puis il y a Camille, son modèle qui deviendra son épouse bien-aimée, avec laquelle il partagera la vie de bohème avant de connaitre la consécration. Elle est morte peu après avoir donné le jour à son deuxième enfant. Une élégante et sensible reconstitution d’une époque.
Bien qu’il vive à Concarneau, en Bretagne, Firmin Le Bourhis a des attaches familiales en Périgord. Voilà pourquoi cet auteur de romans policiers nous livre son dernier opus intitulé « Dernier vol Sarlat – Dinan » aux éditions Palemon. Une mort suspecte conduit le lieutenant Phil Bozzi et le capitaine François Le Duigou dans le cadre enchanteur de la cité de Sarlat. Il s’en faut de peu que les joies gastronomiques ne perturbent l’enquête. Mais une épidémie de grippe aviaire et de nouvelles investigations vont les pousser jusqu’à Bordeaux.
JEAN-LUC AUBARBIER.
ESSOR SARLADAIS du 3 février 2017. Article suivant
ESSOR SARLADAIS du 17 février 2017.