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by • 6 octobre 2016 • Mes chroniques littérairesCommentaires fermés sur ESSOR SARLADAIS du 7 octobre 2016.2317

ESSOR SARLADAIS du 7 octobre 2016.

 

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YASMINA REZA AU CŒUR DE BABYLONE.

Le Tour des Livres.

 

Yasmina Reza est une reine du théâtre mondial. Depuis « Art », puis « Le Dieu du carnage » (adapté au cinéma), on sait qu’elle excelle dans l’art de la digression qui, de saut de puce en détail cruel, révèle la vraie nature de l’âme humaine. « Babylone », son très attendu dernier roman publié chez Flammarion, ne décevra pas ses admirateurs. Elisabeth, la narratrice, mène une petite vie un peu ennuyeuse, entre Pierre, son mari banal et son ami et voisin Jean-Lino. Tout est prévisible dans son univers aussi a-t-elle tendance à se noyer dans les détails (n’est ce pas là que se cache le diable ?) Les réunions entre amis et voisins ont tendance à faire remonter en elle le mal-être de l’enfance et quelques souvenirs magnifiés. Justement, à l’issu d’un de ces diners sans surprise qu’elle a organisé, au cours duquel une dispute un peu absurde à éclater entre Jean-Lino et son épouse, celui-ci sonne à leur porte au milieu de la nuit pour leur dire qu’il vient d’étrangler Lydie. Pierre conseille d’appeler la police avant de retourner se coucher. Jean-Lino semble désemparé ; il préfèrerait s’enfuir. Elisabeth se demande si c’est mal d’aider un ami quand il est devenu un criminel. L’absurde, le comique et le tragique entament un étrange ballet.

Chez de Borée, Robert de Rosa, rédacteur en chef de la revue Point de Vue Initiatique, rejoint le club des auteurs de thrillers ésotériques avec « L’œil de la providence ». Au cours de son initiation dans une loge maçonnique, Joseph Raminovitch est empoisonné. Le décès bien réel a été substitué à la mort symbolique. Marcel Broust, le commissaire chargé de l’enquête, pense à un attentat antisémite, mais deux autres meurtres viennent allonger la liste. Il découvre que toutes les victimes ont habité la même rue à Paris, pendant la guerre. Les enquêteurs devront remonter le temps jusqu’à la rafle du Vel d’Hiv pour découvrir la vérité. Ce premier thriller auvergnat (il se passe à Clermont-Ferrand) est une réussite.

Prix Goncourt 2011, Alexis Jenni nous propose, chez l’Iconoclaste, « Dans l’attente de toi ». L’auteur écrit une lettre à la femme aimée. De cette dernière, on ne sait presque rien, simplement que son corps est émouvant sous la caresse. Le texte entier est consacré au plaisir du toucher, ce sens si difficile à décrire. L’auteur va emprunter aux peintres les mots, les sensations, les images dont il a besoin pour décrire ce corps et ce qu’il ressent, jusqu’à créer une langue originale pour achever son tableau. La douceur d’une peau, la rondeur d’un ventre, la plénitude des courbes apparaissent.

Les éditions Jean-Claude Lattès publient le premier roman de Niels Labuzan : « Cartographie de l’oublie ». C’est un dialogue à travers le temps et l’histoire qui s’instaure entre deux personnages. En 1889, Jakob Ackermann débarque dans le sud-ouest de l’Afrique en compagnie d’une vingtaine de soldats allemands. Au milieu du désert, ils doivent instaurer une colonie de peuplement et apporter la civilisation. En 2004, un jeune Namibien commémore le massacre des Hereros. Il est métis ; tous les hommes de sa famille sont d’origine allemande, toutes les femmes, namibiennes. Il part à la recherche de son passé double.

Aux Presses de la Renaissance, Madeleine Scopello, historienne des religions, publient « Les évangiles apocryphes ». On pense souvent (à tort) que les évangiles se limitent au nombre de quatre. Il s’agit en fait de ceux qui ont été retenus par l’Eglise. Mais il en existe beaucoup d’autres qui, dans un style romanesque, philosophique ou merveilleux, nous racontent bien autre chose. L’enfance de Jésus (c’est là qu’apparaissent l’âne et le bœuf de la crèche) ou l’enseignement gnostique (que reprendront les cathares) se révèlent bien éloignés des dogmes officiels. Les évangiles apocryphes ne sont pas moins vrais que les canoniques, ils racontent simplement un christianisme différent.

 

JEAN-LUC  AUBARBIER.

 

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